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Traduire le monde : Chinoiseries occidentales

André Racicot
(L’Actualité terminologique, volume 36, numéro 3, 2003, page 30)

Les Jeux olympiques de 2008 se dérouleront à Pékin. Oui j’ai bien dit Pékin, mais ne serait-ce pas Beijing, au fond? D’ailleurs n’importe quel Chinois vous le confirmera. De fait, depuis l’adoption aux Nations Unies du système de transcription pinyin, en 1979, les noms de lieu et de personne de l’Empire du milieu ont subi des transformations particulièrement radicales. Ce qui ne plaît pas nécessairement à tout le monde et engendre parfois un peu de confusion.

Les noms de personnalités sont à prendre, si je puis dire, avec des baguettes. Qui ne connaît pas le père de la modernisation économique Deng Xiaoping, décédé en 1997? Mais si vous lisiez dans un vieux livre le nom de Teng siao-p’ing, le reconnaîtriez-vous? Rien n’est moins sûr. Et que dire du président Mao Tsé-toung, devenu Mao Zedong? La transformation touche également des personnages lointains, comme Lao-Tseu, appelé maintenant Laozi.

Même si l’histoire n’est pas votre tasse de thé, il faut quand même savoir que le nom des personnalités contemporaines s’écrit en pinyin, tandis que celui des artistes et des philosophes du passé conserve souvent l’ancienne graphie.

La situation est plus confuse du côté de la toponymie. Certains noms de lieux célèbres devraient changer de graphie pour se conformer au pinyin. Mais voilà, les résistances sont déjà vives pour Pékin, qui devrait être appelée Beijing. Alors, on peut dire qu’une véritable muraille… de Chine s’élève entre d’une part, Canton, Nankin et Setchouan, et d’autre part, leurs copies transfigurées que sont Guangzhou, Nanjing et Sichuan. Si Beijing est en train de s’immiscer dans l’usage courant, cela est encore loin d’être le cas pour ses consœurs.

On peut penser qu’à la longue, les nouvelles graphies finiront par avoir le dessus sur les anciennes. Mais, en attendant, l’écriture des noms chinois représente une difficulté pour le langagier. En effet, comment distinguer l’ancienne graphie de la nouvelle? Le Larousse semble avoir coupé la poire en deux : le nom des villes célèbres est affiché dans le corpus selon l’ancienne graphie, avec la mention « en chinois » suivi du nom en pinyin. Toutefois, le nom des provinces est indiqué uniquement selon la nouvelle graphie. Autrement dit, le Larousse indique au lecteur la graphie la plus fréquemment utilisée.

Le Robert des noms propres conserve les appellations de Pékin, Nankin et Canton. Mais le nom des provinces chinoises est écrit selon la nouvelle graphie; l’ancienne est mentionnée à titre indicatif. Mais bien des ouvrages ne font pas preuve de la même rigueur. Il est heureusement facile de reconnaître les anciennes graphies : elles comportent souvent des traits d’union et les apostrophes sont placés en plein milieu du mot. Le cas de la place Tian’anmen est patent.

Le langagier, dont l’aspiration confucéenne à l’ordre est bien connue, cherchera l’uniformité dans ses textes. Il utilisera plutôt les graphies en pinyin pour se conformer aux usages du présent. Cependant, il témoignera aux vénérables ancêtres le respect qui leur est dû en ne modifiant pas des noms qui, pour l’instant, continuent de s’écrire avec l’ancienne graphie, que ce soit des villes ou des personnages historiques. S’il sent la confusion se glisser insidieusement en lui, il prendra la position du lotus et humera le fumet d’un délicieux thé vert.