Services publics et Approvisionnement Canada
Symbole du gouvernement du Canada

Liens institutionnels

 

Avis important

La présente version de l'outil Chroniques de langue a été archivée et ne sera plus mise à jour jusqu'à son retrait définitif.

Veuillez consulter la version remaniée de l'outil Chroniques de langue pour obtenir notre contenu le plus à jour, et n'oubliez pas de modifier vos favoris!

Rechercher dans Canada.ca

Du bon emploi de « chez »

(L’Actualité terminologique, volume 5, numéro 7, 1972, page 3)

Petit mot de rien du tout qui n’en parvient pas moins à introduire le désordre! La preuve? Elle apparaît au grand jour dans la phrase suivante : « Les résultats indiquent que chez la plupart des colles le vieillissement ne cause aucune détérioration; un affaiblissement a cependant été noté chez les résines formol-uréiques chargées de farine, et chez les résines uréiques… » Qu’on ne cherche pas à connaître la référence de cet extrait, ça deviendrait gênant.

En termes simples, et avec le sourire, tâchons de faire la lumière sur ce chez d’allure insolite.

Pour nous préparer à traiter de la question, il est bon que nous remontions à la racine même de chez. Nous découvrons le sens propre de cette préposition dans la locution latine in casa, « dans la maison de » : Venez chez moi. Faites comme chez vous. Je dois aller chez le médecin.

Avant de poursuivre l’examen du problème qui nous occupe, voyons si l’expression aller au médecin ou au docteur est également correcte. Ouvrons Le Bon Langage de Grevisse; nul mystère ici : le tour aller au médecin appartient au registre familier ou populaire. « La langue littéraire, y lit-on, dit ordinairement : Aller chez le médecin, aller consulter le médecin… » Cela dit, est-il nécessaire d’appeler en témoignage les bons écrivains? Qu’il suffise d’en citer un seul, Georges Duhamel : « Nous irons chez le médecin, Jeanpi. Tu es trop maigre » (La Passion de Joseph Pasquier, VII).

Revenons au vif du sujet. Par extension, chez signifie « dans le pays de » : Répandre la terreur chez l’ennemi, « au temps de » : Chez les Romains, l’autorité du père de famille était suprême, « parmi » : Chez les aveugles, les borgnes sont rois, alors qu’au figuré, il a le sens de « en la personne de » : C’est chez lui une habitude, « dans les œuvres, dans l’esprit de » : Cette construction se rencontre chez Proust.

Mais rien jusqu’ici n’est venu confirmer l’existence d’un désordre. Un autre coup d’œil au Bon Langage nous permet de lever d’emblée toute hésitation qui pourrait planer; de fait, Grevisse ajoute cette remarque expresse : « Chez ne prend pour complément que des noms d’êtres animés : L’instinct chez les animaux. On ne dirait pas : Chez les minéraux. »

Que conclure? Que les colles et les résines, pour remarquables que soient leurs propriétés adhésives et autres, ne sont pas des êtres animés et que, par suite, les tournures relevées sont impropres. Ceux qui aiment la correction du langage savent ce que cela veut dire.

Ce que nous voulons rappeler, pour finir, n’a rien de bien sorcier, mais comme il arrive à tout le monde d’achopper sur l’emploi du trait d’union, la remarque que nous allons faire paraît opportune. La préposition chez, employée avec un pronom personnel, forme un nom composé, signifiant « domicile propre », qui PREND un trait d’union. Exemples : J’aime mon chez-moi. Voici l’adresse de votre chez-vous. Ils ont été chassés de leur chez-eux. Il faut bien suivre les signes orthographiques dans leurs détours, même si les courbes en sont un peu capricieuses.