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Juridictionnaire

insinuatif, ive / insinuation / insinuer

Pour une mise en contexte, se reporter d’abord aux articles COLLOQUIUM et DIFFAMATION 1 et 2

  1. Ces mots illustrent comme bien d’autres deux phénomènes courants dans la terminologie française de la common law. Premièrement, la survie ou la renaissance d’un vieux mot – issu du droit ou non – pour désigner une réalité juridique actuelle : tel est le cas de l’adjectif insinuatif. Deuxièmement, l’entrée dans le droit d’un mot courant du fait de son utilité dans une branche du droit : le mot usuel insinuation enrichit le vocabulaire juridique dans le contexte précis du droit de la diffamation.
  2. Dans la langue courante, l’insinuation est un mot péjoratif, souvent employé au pluriel, évoquant l’allusion malicieuse ou le sous-entendu malveillant; c’est, précisément, un procédé d’expression qui permet de faire entendre son fait à quelqu’un, directement ou par l’entremise de tiers, mais sans le dire ouvertement ni clairement de sorte à laisser planer un doute sur la vérité de l’énoncé et sur l’intention véritable de l’auteur de l’insinuation. L’insinuation peut tout aussi bien n’être qu’une forme d’ironie, de plaisanterie, mais derrière la suggestion peut se mouvoir un esprit de malveillance, de jalousie, de vengeance ou d’attaque 1.

    Même s’il est employé dans un contexte juridique, le mot insinuation n’appartient pas pour cette raison au vocabulaire juridique; ce n’est pas un terme technique du droit. « Les prétentions des appelants sur ce point constituent tout au plus de simples conjectures fondées sur des insinuations, sur des suppositions ou sur des descriptions injustes de déclarations et d’événements. » « L’information révélée au jury constituait tout au plus une insinuation. » « Il n’y a pas la moindre insinuation que l’un des jurés choisis a effectivement eu des rapports avec l’accusé, aussi refusons-nous de juger que cette décision ait eu pour effet d’entacher de nullité le procès. »

  3. Le droit de la diffamation, considère que l’insinuation, dans la perspective d’une diffamation écrite ou verbale, est comprise comme se rattachant essentiellement au sens insinuatif (et donc diffamatoire) des mots prononcés ou publiés, lesquels n’ont pas ce caractère diffamatoire, s’ils sont pris dans leur sens normal ou habituel : l’auteur de l’insinuation prête-t-il à ses propos ou à ses commentaires un sens technique ou familier ou leur donne-t-il un sens qui relève de connaissances particulières qu’il partage avec un nombre restreint de personnes, les revêt-il d’un sens particulier du fait de circonstances extrinsèques, alors ces propos ou ces commentaires constituent en droit une insinuation au sens juridique ("legal innuendo"), encore appelée insinuation véritable ("true innendo"). Alléguer une insinuation au sens juridique, une insinuation véritable. Faits extrinsèques donnant lieu à insinuation. « Le demandeur doit alléguer expressément une insinuation au sens juridique et établir les faits et circonstances sous-jacents; il n’est pas tenu de prouver que le défendeur connaissait les faits particuliers qui donnent lieu à l’insinuation, ni que les commentaires ont été effectivement communiqués à une personne qui en comprenait le sens diffamatoire. Il lui suffit de démontrer que certaines personnes connaissaient les faits extrinsèques et que des personnes raisonnables, ainsi informées, auraient perçu le sens diffamatoire des commentaires. » Insinuation reprochée. « Le juge doit statuer si les mots en question peuvent comporter l’insinuation reprochée, mais c’est au jury de décider si elle existe en fait. »

    Dans le cas où le sens ordinaire et habituel des mots par rapport à leur sens insinuatif ne se dégage que par le jeu d’une inférence ou d’une interprétation, le sens diffamatoire large donné à ces propos ou à ces commentaires est qualifié de faux ou populaire, d’où la pseudo-insinuation ("false" ou "popular innuendo"), laquelle ne donne pas ouverture à une cause d’action distincte. « En common law, chaque insinuation reprochée donnait lieu à une cause d’action distincte, entraînant un verdict distinct. La jurisprudence américaine distingue entre ’l’induction’ – les faits dont le sens diffamatoire découlerait – et ’l’insinuation’ – qui permet de prouver le sens diffamatoire par référence à de tels faits. »

    En français, [innuendo] ne se dit pas; c’est un barbarisme (il n’existe pas dans la langue) ou un anglicisme, selon le point de vue.

  4. L’insinuation ou la glose insinuative désigne aussi, par métonymie, la partie de la plaidoirie en diffamation (en matière civile) dans laquelle le demandeur entend démontrer que les propos du défendeur insinuaient autre chose que leur sens apparent et qu’ils étaient malveillants et diffamatoires.

    En matière criminelle, l’acte d’accusation, dans l’un de ses chefs, doit énoncer le sens dans lequel il faut comprendre l’allégation et l’imputation de diffamation. Par exemple, un chef d’accusation pour la publication d’un libelle peut porter que la matière publiée a été écrite dans un sens qui, par insinuation, en rendait la publication criminelle et peut spécifier ce sens insinuatif sans affirmation préliminaire indiquant comment la matière a été écrite en ce sens. Le même principe s’applique en cas de diffamation verbale.

    Pour qu’il y ait insinuation, les propos ou les commentaires doivent être indirects et porter atteinte à l’honneur et à la bonne réputation du demandeur, la victime de l’insinuation.

    S’agissant du mode d’expression du libelle diffamatoire, le Code criminel prévoit que la diffamation peut être exprimée directement ou par insinuation ou ironie. On dit que l’allégation ou l’imputation de diffamation peut être directe comme elle peut être indirecte, par voie de simple allusion, d’insinuation ou d’ironie. « Il arrive souvent que l’allégation ou l’imputation soit transmise au lecteur par le biais d’une simple insinuation. » « Un libelle diffamatoire peut être exprimé directement ou par insinuation. » « Ils ont été déclarés coupables de libelle diffamatoire par insinuation. » « Selon le moyen de défense invoqué par le défendeur, les déclarations qui lui sont attribuées sont véridiques et ne sont pas diffamatoires ni dans leur sens naturel et ordinaire, ni par insinuation. »

    S’agissant de la preuve à produire pour soutenir ce chef d’accusation, il suffit de prouver, lors de l’instruction du chef d’accusation pour publication d’un libelle ou diffamation verbale, que la matière publiée ou la déclaration faite était libelleuse, avec ou sans insinuation.

  5. Dans la langue classique, l’insinuation a rapport à la séduction du langage et des manières. De ce sens est née l’insinuation rhétorique; cette figure de rhétorique vise à se concilier la faveur d’un auditoire au début d’une allocution par le recours à des paroles habiles et élogieuses. Exorde par insinuation.

    En droit, ce procédé est largement utilisé tant dans le discours juridictionnel – par exemple par l’avocat plaidant à l’endroit du tribunal, par le juge dans ses motifs de dissidence, dans ses motifs de jugement visant l’infirmation de la décision rendue par le tribunal d’instance inférieure ou dans ses remarques incidentes destinées au législateur – que dans le discours doctrinal, par l’auteur qui s’oppose à un principe jurisprudentiel, à une thèse, à une théorie, à une doctrine ou encore à une opinion communément professée par des auteurs d’ouvrages juridiques, aux motifs de droit sur lesquels reposent des décisions de justice ou, même, à des dispositions controversées édictées par le législateur.

  6. Insinuatif. Dérivé savant du verbe insinuer, cet adjectif, vieilli dans la langue courante, s’emploie dans le droit de la diffamation en common law. Sens insinuatif (d’une déclaration, de propos, de remarques), ton insinuatif. Acte insinuatif : par exemple dans le cas d’une insinuation par proximité que constituerait le fait de placer délibérément la photo de quelqu’un bien en vue à côté de celles d’éminents criminels.
  7. Le verbe insinuer s’emploie comme transitif direct (insinuer une inconduite, la commission d’un crime), il introduit une proposition relative, cas le plus fréquent (« Insinue-t-il que j’agis dans l’illégalité? »), et, occurrence plus rare, on le trouve en construction absolue (« Il se contente d’insinuer plutôt que d’avoir le courage de ses convictions. »).

Syntagmes et phraséologie

  • Insinuation avilissante, calomniatrice, calomnieuse, constante, désobligeante, directe, écrite, erronée, fausse, gênante, honteuse, indirecte, irréfléchie, irresponsable, malveillante, mensongère, orale, perfide, publiée, révoltante, subtile, tendancieuse, verbale.
  • Insinuation à l’encontre de (la prépondérance de la preuve).
  • Insinuation de contrainte, d’intrusion, d’irrégularité, de mauvaise foi, de négligence, de partialité.
  • Insinuation d’ordre, de nature, à caractère déontologique, éthique, moral(e), politique, racial(ale), sexuel(elle).
  • Insinuation emportant atteinte, lésion, préjudice.
  • Insinuation fondée, dénuée de fondement, non, nullement, fondée.
  • Insinuation non étayée par la preuve, non prouvée, prouvée.
  • Insinuation par proximité.
  • Faits extrinsèques à l’appui d’une insinuation.
  • Libelle par insinuation.
  • Sens, portée d’une insinuation.
  • Constituer une insinuation.
  • Donner naissance à une insinuation.
  • Étayer une insinuation (à l’égard de qqn).
  • Formuler une insinuation.
  • Lancer une insinuation.
  • Nier une insinuation.
  • Plaider une insinuation.
  • Procéder par insinuation.
  • Prouver une insinuation.
  • Recourir à des insinuations.
  • Se défendre contre une insinuation.
  • Se protéger contre une insinuation.
  • Soulever une insinuation.
  • Insinuer une accusation, une calomnie, une inconduite.
  • Une insinuation repose, s’appuie sur (des faits extrinsèques).
  • LIBELLE.