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Juridictionnaire

disculper 1 / exciper 1 / justifier

  1. Le verbe disculper ("to exculpate", mais [exculper] n’existe pas en français) s’emploie comme transitif direct au sens d’innocenter, de blanchir, de prouver que qqn est accusé injustement, de justifier l’innocence d’une personne, de la mettre hors de cause. Le sujet est le plus souvent une personne (« Par sa déclaration, le témoin a disculpé le prévenu »), mais une chose peut servir à la disculpation : un détail, une déclaration, une pièce justificative, un document « Le document qu’a déposé l’avocat disculpe entièrement son client ». En construction multiple, le verbe disculper s’accompagne d’un complément direct suivi d’un complément indirect : on disculpe qqn de qqch. : par exemple, disculper un prévenu d’une accusation, disculper un accusé d’un crime.

    Par extension, disculper signifie justifier une personne contre une accusation pouvant peser sur elle : « La mère a tout fait pour disculper d’avance son enfant mis en cause dans une affaire louche. »

    Le verbe s’emploie aussi à la forme pronominale au sens de se justifier, de prouver son innocence ou de s’excuser. Se disculper (avoir à se disculper) auprès de qqn, aux yeux de qqn. Il s’emploie surtout avec le verbe chercher : chercher à se disculper (en recourant à divers moyens). Se disculper est suivi d’un complément indirect : se disculper d’un grief.

    L’antonyme est inculper.

    À distinguer de décharger (se reporter à l’article CHARGE) et d’exonérer.

    Il faut conserver la nuance qui existe entre disculper et justifier. Ce qui disculpe qqn prouve son innocence, ce qui le justifie établit qu’il a fait ce qu’il a dû faire; ou, comme l’explique Dupré, on disculpe qqn en plaidant le fait et on le justifie en plaidant le droit.

  2. Ne pas oublier de mettre le c après le x d’exciper.

    Le verbe exciper n’a qu’une construction : c’est un transitif indirect. On ne peut pas dire [exciper qqch.], mais exciper de qqch. De même, ce serait faire une faute syntaxique ou commettre un solécisme de dire : « L’appelant [excipe que](…) »; on devrait tourner autrement : « L’appelant argue de ce que(…) » Le verbe exciper ne peut pas introduire une proposition subordonnée.

  3. Le verbe exciper vient du latin excipere qui signifie soit excepter, soit prendre de, retirer de, recevoir. Ces deux sens ont survécu en français dans l’emploi juridique du terme.

    En droit, le verbe exciper signifie, dans un premier sens, invoquer un fait pour en tirer une exception, soulever, pour sa défense, une exception de procédure, arguer d’une exception, tirer de qqch. un moyen préjudiciel pour faire rejeter une demande en justice ou, à tout le moins, pour la faire écarter momentanément (se reporter à l’article DÉCLINATOIRE et EXCEPTION). L’idée qui domine ici est celle de l’exception invoquée. Exciper de l’autorité de la chose jugée, de la nullité d’un acte, de l’incompétence d’une juridiction, de l’incapacité d’une partie, d’un droit de propriété, de la prescription de l’action. « À la fin de non-recevoir tirée de la tardivité de l’appel, l’appelant défendeur à un incident peut exciper de la nullité de l’acte de signification qui n’a pas été précédé d’une signification à avocat, bien qu’il ait conclu sur le fond. »

    Dans un deuxième sens, le verbe exciper signifie invoquer qqch. pour se défendre, opposer à son adversaire un moyen de défense, étayer sa défense sur un moyen, s’appuyer sur une pièce, un document, pour faire qqch. « Il est interdit d’exciper de sa propre turpitude pour échapper à ses obligations. » « Pour sa défense, il a excipé d’un précédent. » « L’accusé est parfaitement en droit d’exciper de ces moyens dans la procédure d’extradition. » Exciper d’une clause, d’une disposition 1 et 2. Exciper de sa bonne foi. Exciper d’un acte, d’un contrat. L’idée qui domine ici est celle de la défense opposée à une prétention.

    En ce dernier sens, exciper de se rapproche de justifier de qui, transitif indirect lui aussi, signifie, en matière de droit, apporter la preuve matérielle, concrète de qqch. Justifier de sa capacité professionnelle, de son identité, de ses titres et qualités, de la possession de certains documents. Quittance, reçu justifiant du règlement de la facture.

    La locution Justifier de peut être suivie de l’infinitif : « Pouvez-vous justifier d’avoir été notifié? »

  4. Dans son emploi littéraire, la locution exciper de n’est pas neutre comme en droit; il est plutôt dépréciatif et n’a que le deuxième sens souligné ci-dessus, soit celui de faire état de qqch. pour sa défense, comme excuse ou prétexte. Exciper de sa jeunesse, de son impuissance, de son droit à faire qqch., de services rendus.
  5. Attention à l’impropriété qui consiste à employer exciper dans un sens qu’il n’a pas. Le barbarisme que renferme la phrase qui suit est doublé d’un solécisme, puisque le juge fait d’exciper un verbe transitif direct : « Le tribunal est d’avis que la Loi et son règlement d’application constituent un code global de réglementation de la publicité dont les parties sont si étroitement reliées qu’il serait illusoire de vouloir [exciper de la loi] certaines dispositions qui relèvent du champ de compétence du fédéral ». Il eût fallu dire extraire de la loi(…)