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champarteur / champarteuse / champartie / défenseur abusif / défenseure abusive / souteneur abusif / souteneuse abusive / soutien abusif

  1. Étymologiquement, le mot champartie (et non [champarterie]) vient de l’ancien français champart signifiant cens en nature pris sur le champ avant que le tenant n’ait enlevé sa récolte. En droit féodal, le seigneur du fonds de terre s’attribuait, à titre de rente, une part de la récolte du tenant. De cette acception primitive du mot dans l’ancien droit des biens origine la champartie, telle que la connaissent depuis plusieurs siècles maintenant le droit anglais et le droit de la responsabilité délictuelle en régime de common law, plus précisément en matière d’abus de la procédure judiciaire.
  2. Le droit de la responsabilité délictuelle en common law – encore appelé plus succinctement droits des délits civils ou, mieux, droit du délit ("law of tort", "law of torts", "tort law") – connaît deux délits qui, par leur rapprochement étroit, peuvent aisément être confondus. Le risque de confusion est grand, aussi demeurera-t-on attentif à leur fine distinction.

    Il ne faut pas considérer comme identiques mais apparentés les délits de champartie ("champarty", variante orthophonique de "champerty") et de soutien délictueux (et non [délictuel]) que le droit anglais nomme "maintenance".

    Associés par la doctrine des auteurs et la jurisprudence des tribunaux, ces deux délits intentionnels se rangent sous la rubrique générale de l’assistance en justice. La champartie est une forme de soutien délictueux. Interdiction de la champartie. Lois régissant le soutien délictueux et la champartie.

    Il y a commission du délit de champartie quand un tiers hors de cause (c’est-à-dire non impliqué dans un procès) s’entend avec l’une ou l’autre partie au litige pour l’aider financièrement (sous forme de dons ou de prêts d’argent, de paiement intégral des frais de l’action ou de non-paiement des dépenses que le plaideur aurait pu engager) à triompher en vue de partager le produit de la victoire. « Le simple engagement de fournir des informations en vue de la poursuite du litige contre l’attribution d’une part du produit du procès n’est pas considéré comme constituant une champartie. » « Les demandeurs prétendent que cette cession ne constitue pas une champartie, car rien ne prouve que la bande ait transigé en vue de partager les profits obtenus du litige. »

    Si est absente la notion d’illégitimité de l’intervention dans un procès ou dans une procédure, l’intervention illicite devient un soutien délictueux (plus vaguement, un soutien illicite) du fait que la promotion ou l’appui indu apporté par le tiers étranger à l’action n’est pas motivé, contrairement au cas de la champartie, par l’espoir d’un partage fixé d’avance des gains ou d’une récompense. Action pour (et non [en]) champartie (et) soutien délictueux. Constituer une champartie, un soutien délictueux.

    Autrement dit, la champartie est la forme aggravée du soutien délictueux parce qu’elle s’organise autour d’un pacte illicite par lequel la personne qui promet de prêter son concours stipule qu’elle aura droit à telle part du produit du procès.

    Le marché conclu entre le plaideur et le tiers, parfois pour se partager un bien-fonds contesté, un objet de valeur ou tout droit litigieux, est souvent machiné par l’avocat de cette partie, lequel soutiendra à ses frais l’action entreprise. Des lois canadiennes sur la profession d’avocat, telle celle du Yukon, interdisent expressément la pratique de la champartie. Acte, cas de champartie.

    Évidemment, il n’y a pas champartie lorsqu’est conclu entre l’avocat et son client un accord d’honoraires conditionnels ("contingency fee agreement") : les honoraires seront, certes, prélevés sur le produit de la poursuite, mais, dans pareil pacte, l’avocat n’accepte jamais de prendre à sa charge les frais et dépens de l’action.

    Dans l’optique du droit des contrats, les tribunaux de common law, considérant que la promesse obtenue par la champartie est fondée sur une contrepartie immorale, refuseront, règle générale, d’en ordonner l’exécution, même si elle est valide au regard des lois du pays qui régissent le contrat.

    Règles interdisant la champartie. D’autres branches du droit connaissent la champartie. Par exemple, le droit commercial interdit à un groupe de recourir aux services d’une société commerciale pour amasser des fonds afin de poursuivre une banque sans violer la règle interdisant la champartie.

    Pour un rapprochement historique à faire avec la notion de "common barratry" en common law, se reporter à BARATERIE, au point 5.

  3. En droit civil, le délit de champartie, sous cette forme particulière dans laquelle le tiers est l’avocat occupant pour le plaideur, s’appelle pacte de (prononcer dé puisque la préposition est latine) quota litis (et non [pacte de] quota litis), littéralement pacte sur la quote-part du procès. Par cette convention illicite, l’avocat qui reçoit le mandat de représenter un justiciable dans une action fixe par avance le montant de sa note d’honoraires en fonction de l’issue ou du sort du procès. Puisque le pacte porte sur le montant des honoraires, les auteurs, dans une langue moderne, préfèrent parler du pacte d’honoraires d’avocat.

    Conformément à cet accord, le titulaire du droit litigieux accepte d’abandonner à son procureur soit une partie de l’indemnité que lui accordera le juge, soit tout ce qui sera recouvré par suite du procès.

  4. On dit par renforcement champartie et soutien délictueux ("maintenance and champerty") dans le cas où la participation du tiers consiste en une aide financière et en un appui de toute autre sorte, l’idée du pacte illicite intervenu étant exprimée par le vocable champartie et celle de la poursuite de l’action par celui de soutien. Allégation de champartie et de soutien délictueux.

    « L’accord intervenu est nul et de nullité absolue en tant qu’entente de champartie et de soutien. » « L’action du demandeur fait l’objet d’un soutien délictueux et il existe une entente de champartie liée à l’introduction et à la poursuite de l’action. » Champartie du demandeur, de la partie défenderesse. Droits de la partie lésée par la champartie et le soutien délictueux. « La théorie de la champartie et du soutien délictueux repose sur des considérations d’ordre public. » Étant des délits civils, ils ne peuvent constituer des défenses opposables à l’action.

  5. L’auteur d’une champartie ou le tiers qui s’entend avec le plaideur pour poursuivre un litige à ses frais en vue d’en tirer tout ou partie de l’indemnité qui sera accordée est le champarteur, la champarteuse ("champertor" ou "champertous maintainer"), l’auteur d’un soutien délictueux étant le défenseur abusif, la défenseure abusive ou, dans une autre terminologie, le souteneur abusif, la souteneuse abusive d’une poursuite ("maintainor").

    Il faut se hâter de préciser que les deux formes féminines sont virtuelles. Toutefois, s’agissant de souteneuse, puisque le suffixe -euse et le vocable, contrairement à défenseure, évoquent l’infraction criminelle de proxénétisme, le mot se justifie beaucoup plus en l’occurrence et il y a tout lieu de croire qu’il finira par être généralement admis comme variante synonyme de défenseure abusive, ce terme présentant le double désavantage de ne pas comporter de connotation péjorative et de n’évoquer que le seul cas (parmi plusieurs autres, différents) où l’auteur du soutien délictueux assure abusivement la défense du plaideur.

  6. Le français est dépourvu à ce jour d’adjectif qui permette de qualifier le pacte qui fonde le délit de champartie ("champertous agreement"). On emploiera en tel cas la forme substantive descriptive : accord, convention, entente, pacte de champartie (et non [champarteux]).
  7. On ne confondra pas non plus les délits de soutien délictueux et de champartie avec ceux, connexes, du recours abusif ou de l’abus de procédure ("abuse of process"), lequel se rapporte au cas où un plaideur se sert d’une procédure judiciaire dans un but différent de celui auquel la procédure est destinée, et de la poursuite malveillante ("malicious prosecution").