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Juridictionnaire

décisoire / supplétoire

Le mot décisoire est emprunté du latin decisorius, dérivé du verbe decidere, qui signifie décider. Comme le suffixe en -oire l’indique, il évoque l’idée d’une fin à réaliser, d’un objectif à atteindre, le résultat recherché étant l’obtention d’une décision. Est qualifié de décisoire ce qui a vertu de décider, ce qui entraîne l’obligation de prendre ou de rendre une décision.

L’adjectif s’emploie absolument (erreur de droit décisoire, question décisoire) ou il s’accompagne d’un déterminant (fait décisoire de qqch., manière, modalité, mode décisoire aux fins de qqch.). « Le fait que les documents renferment une disposition expresse prévoyant que les renseignements ne doivent pas être divulgués sans la permission du tiers n’est pas décisoire des obligations de communication découlant de la loi. » « La manière dont l’agent a apprécié ces facteurs est décisoire aux fins du présent contrôle. » Acte, caractère, effet, pouvoir décisoire. « L’assemblée générale peut examiner sans effet décisoire toutes questions non inscrites à l’ordre du jour. Autrement dit, cet examen ne pourra se traduire d’aucune manière en décision. » « Le juge a seul pouvoir décisoire en cette matière. »

  1. Dans le discours juridictionnel et dans le vocabulaire de la procédure civile française, l’adjectif décisoire qualifie tout ce qui a le pouvoir, du fait de sa nature et de ses conséquences, de conduire le tribunal à rendre sa décision.

    Le syntagme le plus fréquent est le serment décisoire. « Le serment décisoire peut être déféré sur quelque espèce de contestation que ce soit. » Ce type de serment est, dans le cadre d’une instance, déféré par l’un des plaideurs à l’autre sur des faits personnels à ce dernier. Une fois le serment prêté, le juge doit tenir pour établis les faits objet du serment. C’est dire que ce serment lie le juge. Sa force probante étant rendue par là inattaquable, il commande la solution du litige, d’où sa qualification de décisoire.

    Prêté sur l’honneur, ce serment constitue un mode de preuve que prévoient les codes civils et les codes de procédure civile. Par exemple, le demandeur se trouvant démuni de preuve établissant que le défendeur lui doit quelque chose peut le sommer de jurer qu’est vraie ou fondée la prétention qu’il avance dans sa demande. On dit alors qu’il lui défère le serment. Tel peut être le cas du débiteur qui, se trouvant incapable de prouver qu’il a remboursé son créancier, lui demande de jurer qu’il n’a jamais été remboursé.

    Plutôt que de refuser de prêter ce serment et au lieu de le prêter – et perdre son procès en conséquence –, le défendeur peut référer le serment au demandeur, c’est-à-dire le lui renvoyer, autrement dit, le lui déférer à son tour, et déclarer ainsi se soumettre par cette stratégie à l’effet que produira le serment prêté par le demandeur. Si celui-ci refuse de prêter le serment ainsi déféré, c’est lui qui perdra son procès; s’il le prête, il le gagnera. « Si la partie refuse de prêter le serment décisoire qui lui est déféré, son refus vaut aveu 1 judiciaire, sauf à référer le serment à son adversaire de la fausseté du fait allégué. »

    Parfois qualifié de supplétif, le serment supplétoire se dit par opposition au serment décisoire. Il est déféré d’office par le juge du procès à l’une des parties dans le cas d’une insuffisance de la preuve portant sur un fait profitable ou favorable à la partie qui le prête. Par cette affirmation solennelle, la partie jure que le fait allégué est vrai. Le rôle du serment supplétoire comme mode de preuve en droit civil consiste à suppléer la preuve manquante. « Le serment supplétoire ne peut être déféré par le juge que pour compléter le bien-fondé d’une demande ou d’une exception déjà justifiée par un commencement de preuve légale, ou lorsqu’un doute existe sur le caractère décisif des preuves produites. »

    Le serment supplétoire n’est recevable qu’en tant que complément de preuve et sa force probante est abandonnée à l’appréciation du juge, celui-ci n’étant pas lié, à la différence du cas du serment décisoire, par le serment ainsi prêté. « Le serment supplétoire ainsi déféré ne lie ni la partie, ni le juge, et celui à qui il est déféré ne succombe pas nécessairement s’il ne le prête pas. »

    Le serment décisoire et le serment supplétoire ont constitué dans la procédure civile les deux types de serment judiciaire. « Le serment judiciaire est de deux espèces : 1. celui qu’une partie défère à l’autre pour en faire dépendre le jugement de la cause est appelé décisoire; 2. celui qui est déféré d’office par le juge à l’une ou à l’autre partie est appelé supplétoire. » L’évolution du droit actuel permet d’affirmer que ces deux modes de preuve, abandonnés au profit des expertises et des enquêtes, sont, tout comme le serment purgatoire dans le procès pénal, frappés aujourd’hui d’obsolescence.

  2. Dans un sens large, l’adjectif décisoire qualifie ce qui doit ou peut aboutir à une décision.

    La consultation décisoire est celle qui est menée auprès des personnes concernées ou des groupes intéressés; on la trouve dans le droit des affaires ou dans le droit des entreprises et elle est dirigée par des organismes ou des sociétés auprès de leurs membres dans le cadre d’assemblées des membres ou des actionnaires en vue d’une prise de décision. Elle peut être menée aussi auprès de la population en général. Par exemple, pour une autorité publique ou un gouvernement, elle n’a pas nécessairement d’effet décisoire à propos d’une norme, d’un programme ou d’une option politique.

    L’ensemble des activités qui conduisent à la prise de décision après consultation s’appelle le processus décisoire. Les décisions prises sont le résultat d’une opération décisoire, qu’elle soit individuelle ou collective.

    La reconnaissance décisoire est celle qui permet de conduire à une prise de décision, tel le cas où une autorité publique accorde pareille confirmation à propos d’un droit, laquelle autorise l’accès à son exercice.

    La cause décisoire et l’arrêt décisoire ont pour objet de décider une question litigieuse opposant deux parties : ils ont force exécutoire. Ces termes se disent en matière contentieuse par distinction d’avec la cause ou l’arrêt qui, en matière purement consultative, se limitent à répondre à une demande d’interprétation, s’agissant, par exemple, de l’arrêt ou du renvoi qui répond à une question portant sur l’interprétation d’un texte constitutionnel. La juridiction saisie rend alors un arrêt interprétatif plutôt qu’un arrêt décisoire. « Les contestations faites par les barreaux quant à la constitutionnalité de la disposition législative ont abouti à l’arrêt décisoire de la Cour suprême de la Colombie-Britannique sur la question. » Instance (et non [décision]) décisoire.

  3. En droit canadien, la cause décisoire ("test case") s’entend aussi de celle dont la solution fait jurisprudence, de la cause type, du précédent. Procès décisoire. En droit administratif, la circulaire ou le guide d’interprétation, acte unilatéral destiné à la diffusion au sein de l’administration et de la population pour diriger et guider l’application d’un texte, n’est pas décisoire, contrairement à la norme juridique que constitue la loi ou l’acte administratif, mais interprétatif puisque son objet est d’expliquer le sens des normes que renferme l’état du droit. Acte, texte non décisoire.

    La phase décisoire du texte d’un arrêt est celle par laquelle le tribunal est amené à statuer; elle précède la phase de la motivation de la décision. La phase décisoire du procès est celle par laquelle le tribunal, ayant entendu les parties, rend sa décision ou se retire pour délibérer. Phase décisoire du procès civil, du procès pénal.